JUSQU’À l’orée du XXIe siècle, les États-Unis d’Amérique furent une puissance – durablement, la première – logique, réglée et prévisible. En son sein ou dans le monde, un événement advenait-il ? Un péril émergeait ? On savait comment réagirait Washington. Or sans doute, le monstrueux choc du 11 septembre désaxa l’Amérique dirigeante ; depuis, tel un bateau sans quille, tous les vents – dangereux, absurdes, grotesques – de l’outrance sociétale secouent cette superpuissance à la dérive.
Affaires libidinales érigées en fondamental militantisme ; ergotages nominaux monopolisant jusqu’à l’état-major des armées ; frivoles indignations inondant les médias… Les pires stupéfiants, partout et pour tous… Dernier délire en vue, la dépénalisation des drogues « stimulantes » ; d’abord, la MDMA (Respirons bien : 3,4 Méthyl-eneDioxy- MetAmphétamine). Comme jadis pour le cannabis ; comme naguère pour les analgésiques opioïdes (Oxycontin), tout démarre dans un monde académique-scientifique américain asservi à Big Pharma, méga-entreprises pharmaceutiques régissant la recherche du monde anglo-saxon.
Mais qu’est-ce d’abord que la MDMA ? Dès 1910, le laboratoire allemand Merck brevète cette molécule parmi d’autres, sans tests humains. Durant la guerre froide, la CIA use de psychotropes MDMA, LSD, comme « sérum de vérité » pour interrogatoires. L’idée : finie la torture, un cachet révèle tout. Ensuite – en mode LSD toujours, MDMA investit la scène psychédélique californienne sous le sobriquet d’ecstasy.
Le LSD est interdit en 1966, mais jusqu’en 2002, MDMA reste une drogue de concerts de rock, rave-parties et boîtes de nuit. Là, une loi très dure – poussée par le sénateur démocrate Joe Biden – bannit la soi-disant « drogue de l’amour », en fait toxique et carbonisant sans retour le cerveau des toxicomanes. À l’époque déjà, quelque 10 millions de drogués ont essayé ou pratiquent l’ecstasy.
Accéléré avant jusque vers 2020. Big Pharma cherche sa nouvelle baguette magique/ poule aux oeufs d’or, après le désastre des opioïdes : des milliards et toujours plus ! Apparaît alors MAPS (Multidisciplinary Association for Psychedelic Studies), lobby pro-libéralisation des drogues stimulantes ou psychédéliques. Fasciné, Big Pharma adopte vite la logique et le discours des promoteurs de cette nouvelle « pénicilline de l’esprit » ; les voici.