IV – 5 Les autres victimes.

La liste des victimes de l’intimidation est longue.

Impolitesses, grossièretés, insultes ne donnent certes pas lieu à des plaintes, par peur, par lassitude, par découragement, mais néanmoins constituent le lot quotidien de ceux qui sont confrontés à éduquer, côtoyer, vivre avec ces jeunes.

L’impact de ces actions a pris depuis ces dernières années une ampleur révélatrice d’un immense laisser-faire, matérialisé par la visibilité de leurs traces: vandalisme, dégradation de matériel public ou privé, voitures incendiées et surtout l’arrogance triomphante de leurs auteurs.

Les formes de ces actions sont devenues de plus en plus contagieuses, mobiles et bien peu punies puisque répétitives et par voie de ricochet touchant un nombre de plus en plus grand de victimes.

La conquête du territoire de la cité, de la rue, du quartier, de l’école sans que rien de véritablement sérieux ne s’y oppose en terme de justice, a considérablement renforcé le sentiment de pouvoir et d’impunité de ces intimidateurs .

D’abord amateurs, puis ensuite véritables caïds de bandes, de manière empirique et souvent sauvage, ils ont développé tous les critères qui permettent de qualifier leurs actions de délits, mais aussi de crimes.

D’autres victimes ont ainsi rejoint la liste de celles qui se trouvaient sous le tir des «incivilités» ordinaires et quotidiennes. Des victimes volées, battues, terrorisées, souvent issues du même milieu social, dépouillées, rackettées, n’offrant aucune défense et condamnées au silence.

Intervenir dans ces territoires, c’est exposer tous les représentants des institutions à devenir eux mêmes des cibles privilégiées de cette haine: policiers, gendarmes, médecins, urgentistes, pompiers, facteurs, éducateurs…

Et, bien entendu, à ces territoires sans lois ni droit, il fallait une économie compensatrice de la frustration, économie souterraine, parallèle, juteuse manne du crime, celle du vol et de la drogue. Ainsi ces jeunes caïds des cités sont devenus dans leur professionnalisation de la délinquance des pourvoyeurs de mort auprès d’un autre type de victimes qui, elles-mêmes, ne les dénonceront jamais.


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